La montée à bord
Il y a deux manières de monter à bord. La première consiste à gravir lestement une espèce d’escalier, formé de petites traverses de bois qui sont clouées sur la paroi extérieure du navire, et à se hisser sur le pont au moyen de deux cordes qui tombent de chaque côté en guise de rampes.
Robert-Robert monta par cette voie, mais on ne put jamais décider Lavenette à en faire usage.
« Allons donc! s’écriait-il pour donner le change sur sa frayeur, une telle route n’est bonne que pour des chats ! J’estime trop ma qualité d’homme, ma dignité d’animal intelligent et raisonnable, pour consentir à me ravaler à ce point ! Allons donc! »
Il fallut employer la seconde manière, c’est-à-dire le fauteuil qui sert à l’embarquement des femmes, des enfants, des vieillards, des personnes infirmes ou peureuses. Ce fauteuil descendit du haut de la vergue, au bout de sa longue corde, et puisa Lavenette au fond de la chaloupe. Par malheur pour lui, son costume étrange avait mis de belle humeur tous les matelots qui tiraient la corde du fauteuil. Avant de laisser leur victime mettre le pied sur le pont du navire, ils se donnèrent le malin plaisir de la hisser jusqu’à la vergue, de la redescendre encore, de la secouer pendant quelques minutes rudement, dans cette sorte de panier à salade. Il fallut l’intervention de Robert et de Simon pour mettre un terme à ce badinage qui faisait jeter les hauts cris à Lavenette. Tel était le phénomène que nous avons vu intriguer si fort l’esprit divinatoire des curieux de Brest.
Extrait des Aventures de Robert-Robert par L. Desnoyers, illustré par F. de Courcy, 1839.
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